Les loups à droite, les agneaux à gauche...

Raffaele Simone nous explique pourquoi l'homme est par essence égoïste et agressif et que la civilisation le rend coopératif et empathique...
[...] Les valeurs de droite sont "naturelles", au sens où elles sont primaires, ce sont bien les mêmes principes  qu'on retrouve à la base du comportement des petits enfants. Quant aux valeurs de gauche, ce sont toujours des réactions à ces élans primaires, elles sont donc secondaires.
[...] En Occident, depuis le siècle des Lumières, la culture et l'éducation ont lutté de concert contre les instincts égocentriques, égoïstes, agressifs des êtres humains en général et des enfants en particulier.[...] La culture actuelle ne semble plus concentrée sur la maîtrise des instincts archaïques, mais, au contraire, elle les flatte. 
[...] Nous éprouvons de moins en moins de sentiments à l'égard de notre prochain, même sa mort nous est d'autant plus indifférente que nous vivons environnés d'écrans, sur lesquels le monde se transforme en pixels. Dans une ère dominée par les images numériques, les valeurs de solidarité sont remisées à l'arrière-plan. Tuer ne comporte aucun coût moral, si on le fait dans un jeu vidéo ou dans un petit film sur YouTube
[...] La nature humaine est égocentrique et agressive [...]. La psychologie infantile et l'observation de la vie familiale [le prouvent]. Les enfants, surtout lorsqu'ils sont petits, tendent à se poser au premier plan, à solliciter l'attention des autres et à manifester leur dépit en cas de frustration. 
[...] L'empathie me paraît une motivation secondaire, l'expression dérivée, intelligente, de l'instinct de préservation de conservation [...]. 
[...] Au départ, l'homme est de droite, c'est-à-dire égoïste et prédateur, mais, pour des raisons variées qui ont beaucoup à voir avec la peur et l'instinct de survie, il acquiert le goût de la coopération et même de la paix, qui ont des avantages évidents sur la guerre perpétuelle. Dans ce sens, je suis hobbesien, oui [...]. 
[...] Quels sont les fondamentaux conceptuels de la droite ? J'en citerai cinq : le postulat de supériorité ("moi je suis le premier, tu n'es personne") ; le postulat de propriété ("ça c'est à moi, et tu n'y touches pas") ; le postulat de liberté ("je fais ce que je veux comme je veux") ; le postulat de non-intrusion dans la vie de l'autre ("ne te mêle pas de mes affaires") ; le postulat de supériorité du privé sur le public ("chacun pour soi et tant pis pour le bien commun"). La gauche combat tous ces postulats : elle oppose l'égalité et la valeur du "nous" aux prérogatives du "moi-je" ; elle propose de corriger la propriété par la redistribution ; elle n'exclut pas de poser des limites à la liberté, car il faut proscrire toutes les conduites contraires au bien commun ; la gauche prône en général le droit d'ingérence dans les affaires d'autrui au nom de l'intérêt général ; enfin, elle affirme que l'intérêt public doit l'emporter chaque fois qu'il entre en conflit avec les intérêts privés. 
[...] Les valeurs de droite sont "naturelles", au sens où elles sont primaires, ce sont bien les mêmes principes  qu'on retrouve à la base du comportement des petits enfants. Quant aux valeurs de gauche, ce sont toujours des réactions à ces élans primaires, elles sont donc secondaires
[...] La droite n'est plus du côté de la sévérité et du respect des traditions, mais de l'enrichissement rapide, de la compétition acharnée ; elle en appelle au peuple, à ses goûts et à ses aspirations. [...] En face d'elle, la gauche, qui continue à défendre l'importance du savoir, de l'éducation, du public, de la solidarité envers les plus démunis, et les étrangers, qui prêche l'impôt comme source de redistribution [...] n'a que du renoncement à proposer ; elle a donc, par rapport aux goûts mis en circulation par notre époque, quelque chose de pénitentiel.
Raphaele SIMONE (propos recueillis par Alexandre LACROIX), Philosophie magazine05/2012, p. 59

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