Pas si grave...

La dette totale de la France, 1 640 milliards d'euros, est comparée à la production de richesse d'une seule année, 1 995 milliards d'euros. Or il faut plutôt comparer à la durée du titre de dette, soit 7 ans et 31 jours selon les statistiques du Trésor public. Sur cette durée nous produirons 14 000 milliards, ce qui ramène le taux d'endettement réel à 12 % de ce que nous allons produire en France d'ici là. Quant au service de la dette, 50 milliards chaque année, comparés à la richesse produite... dans l'année, il ne représente que 2,5 %.
Jean-Luc MELENCHON, France 5, C/Politique, 04/09/2011.

Cet argument revient presque un an plus tard, sur France Inter. Mais cette fois, les journalistes font intervenir un auditeur contradicteur...
N'importe lequel d'entre-vous autour de cette table, quand il s'endette, le banquier lui fixe comme limite [...] que se soit pas plus de 30 % de vos revenus qui passent dans les paiements des emprunts. 30 % ! Pas 2,5 %, 30 % ! La situation comptable aujourd'hui est absurde : on compare un flux à un stock. C'est-à-dire que l'on prend le total du stock de la dette, et on le compare à votre revenu d'une année. C'est un mode de comptabilité absurde. Il faudrait le rapporter à la somme totale de ce que vous allez gagner pendant la durée de votre prêt. Jean-Luc MELECHON.
Les 30 % que peut rembourser un particulier sont les intérêts ET le capital. Dans votre démonstration, les 50 milliards, ou les 2,5 %, ne sont QUE les intérêts. Dans votre raisonnement il manque le capital à rembourser en proportion du PIB du pays. Un auditeur.
[...] Je vais refaire le calcul pour y intégrer 1992 milliards étalé sur 7 ans et demi. On va faire le calcul et on va voir ; ça m'étonnerait que ça monte la charge beaucoup plus haut que le point où elle se trouve [...].
France Inter, 01/10/2012.

Enfin, sur son blog, Jean-Luc Mélenchon clôt le débat...
[...] C'est un argument purement rhétorique car ces remboursements annuels ne sont pas imputés sur le budget mais refinancés par de nouveaux emprunts. Sur les 180 milliards d’euros empruntés en 2012 par la France 81 milliards servent à financer le déficit et les 99 autres milliards servent à renouveler les emprunts arrivés à terme. A l'appui de mon raisonnement, j'ajoute que si l'on veut se livrer à des comparaisons sur le stock de dette, le bon sens voudrait qu’on le compare aussi au patrimoine économique total du pays. Il s'élève selon l'INSEE à 12 000 milliards d'euros. Avec cette comparaison d'un stock à un autre stock, la dette représente 16 % du total du capital du pays. Le Blog de Jean-Luc Mélenchon
Assimiler l'État à un ménage est d'une pertinence toute relative, mais tentons de faire ce calcul le plus rigoureusement possible...

À la fin du deuxième trimestre 2012, la dette publique s’établit à 1 832 600 000 000 €. INSEE.

La dette publique telle qu'entendue ici est très précisément la dette au sens de Maastricht (dette brute des administrations publiques). Certains chiffres nécessaires à ce calcul ne sont pas disponibles pour l'année 2012 au moment de la rédaction de cet article. Je m'appuie donc sur la dette publique de 2011, soit 1 717 000 000 000 €. INSEE

La durée de vie moyenne des titres de dette française était, en 2011, de 7 ans et 50 jours. AFT

Le PIB de la France était, en 2011, de 1 996 000 000 000 €. Wikipédia

La charge de la dette s'élevait à 46 800 000 000 € sur cette même année. Sena.fr

Imaginons que l'Etat doivent rembourser intégralement sa dette à l'issue des 7 ans et 50 jours qui viennent.  Ici, difficile de ne pas faire une approximation, une moyenne...
Outre du stock de dette, le service de la dette dépend du niveau des taux d’intérêt, de la structure de la dette et de la manière dont elle est gérée. Vie Publique.fr.
Je considère donc que la charge va rester la même tout au long des 7 ans et 50 jours. Les mensualités de l'État français seraient donc, au pire, de...
1717 / 86 mois (le capital) + 46,8 / 12 mois (les intérêts) = 23 870 000 000 € par mois.

Le taux d'endettement de l'État français serait donc de...
23,87 / (1996 / 12 mois ) x 100 = 14,4 %.

Cependant, étrangement, le calcul du taux d'endettement public, est, on vient de le voir, calculé en fonction du total des richesses produites par les agents économiques en France, et non en regard des revenus de l'État, c'est-à-dire, ses recettes fiscales. Si l'on tient donc absolument à comparer les administrations publiques à un ménage, ce sont ces recettes fiscales qu'il faut utiliser dans le calcul en lieu et place du PIB...

Recettes nettes du budget général en 2011 : 271 300 000 000 €. INSEE

Le taux d'endettement du ménage France est alors de...
23,87 / (271,3 / 12 ) x 100 =  108 %.

Pourtant, dans la blog d'Olivier Berruyer...
Intérêts de la dette + Amortissement de la dette = 200 % des recettes de l’Etat (pour mémoire, votre banquier exige que ce chiffre soit inférieur à 30 %…). LesCrises.fr.
Il doit donc y avoir une erreur dans le calcul qui précède... Mais laquelle ?

Dernier addendum...
La réponse est dans le livre d'Olivier Berruyer, Les faits sont têtus. Il obtient un chiffre plus impressionnant car il n'utilise pas la méthode communément employée par les banquiers pour calculer le taux d'endettement. Sur une base de 2 000 € de salaire mensuel pour l'État, il ajoute aux intérêts de la dette (500 €) et à son amortissement (3 000 €)... ses dépenses courantes (2 500 €). Soit dans ce cas, un total de 6 000 € de dépenses totales nécessitant un emprunt de 4 000 € d'où les 200 % d'endettement.

Cependant sans compter ces dépenses courantes, son taux d'endettement reste très supérieur à celui calculé plus haut...
(3 500 / 2 000) x 100 = 175 %.

Cela s'explique en partie car dans les 3 500 € de dépenses mensuelles, Olivier Berruyer compte 500 € de charge sur la dette, soit 25 % du "salaire" de 2 000 €. Pourtant, avec les chiffres sus-cités...

Charge de la dette : 46 800 000 000 € en 2011. Sena.fr
Recettes nettes du budget général en 2011 : 271 300 000 000 € cette même année. INSEE

... ce ratio n'est que de 17 % ! De plus il parle de "200 milliards de recettes nettes" et non des 271 milliards cités par l'INSEE. Bref, on ne voit pas d'où peuvent provenir les chiffres utilisés par Olivier Berruyer...

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