Entomophagie...

En 2010, année où, selon les Nations unies, près d'un milliard d'humains ont souffert de faim chronique, la revue Science a publié un numéro spécial sur le "sécurité alimentaire", avec un article sur l'entomophagie, le nom rébarbatif mais précis de la consommation d'insectes.
[Ces derniers] sont connus pour leur faible "empreinte alimentaire" ; ces organismes à sang froid consomment quatre fois moins d'énergie pour convertir les nutriments en viande que les bovins, qui en gaspillent pour rester chauds. A poids égal, nombre d'insectes contiennent la même quantité de protéines que le boeuf, trois fois plus dans le cas des sauterelles frites, et sont riches en micronutriments comme le fer et le zinc. Génétiquement, ils sont si éloignés des humains qu'il est peu vraisemblable que des maladies franchissent la barrière des espèces, comme dans le cas de la grippe porcine. Ce sont des recycleurs naturels, capables de manger vieux cartons, fumier ou sous-produits de l'industrie alimentaire. Qui plus est, l'élevage des insectes se fait sans cruauté, puisqu'ils aiment s'entasser les uns sur les autres, et s'épanouissent dans le surpeuplement et la saleté. [Enfin], ils produisent sensiblement moins de gaz à effet de serre que les bovins et les porcs.
[...] C.F. Hodge, en 1911, a calculé qu'une paire de mouches domestiques s'attelant à la tâche en avril, pourrait produire assez de rejetons pour couvrir la Terre, si tous survivaient, d'une couche de 14 mètres d'ici au mois d'août... 
[...] Selon la Food and Drug Administration, qui publie un guide sur les "taux d'anomalie" tolérés dans les aliments transformés, les épinards congelés ou en conserve ne sont pas considérés comme contaminés tant qu'ils ne contiennent pas plus de cinquante pucerons, "thrips" (thysanoptères) ou mites par centaine de grammes. Le beurre de cacahuète a quant à lui le droit de renfermer trente fragments d'insectes par centaine de grammes, et, pour le chocolat, le seuil est de soixante ! 
[...] Rendre les insectes propres à la consommation est coûteux en main-d'oeuvre, et ils ne sont pas franchement bourratifs. Il faudrait manger un millier de sauterelles pour ingérer l'équivalent en protéines d'un steak de 350 grammes. 
[...] "S'il existait des insectes de la taille des cochons, je vous assure que nous les mangerions." [Tom Turpin]. Les quatre cinquièmes des espèces animales de la planète sont des insectes, mais les variétés comestibles ne sont pas particulièrement faciles à trouver.
Dana GOODYEAR (The New Yorker, 15/08/2011), Books, 09/2012.

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