Prime à l'amoralité...

Le directeur d'un centre de transfusion sanguine veut augmenter ses stocks, et offre pour ce faire , une prime aux donneurs. Mais à sa stupéfaction, le nombre de donneurs s'effondre ! 
[...] Les gens agissent soit par intérêts soit par soucis moral, mais pas pour les deux à la fois ! 
[...] A partir de là, il peut aller en arrière, ou plus loin en avant : augmenter les primes pour que les donneurs reviennent. C'est cette seconde voie que le capitalisme a choisie depuis le tournant des années 1980. Il augmente les primes et durcit les peines pour inciter à l'effort. Ce faisant, il détruit la "valeur travail" : le souci de bien faire, d'être respecté par ses collègues... Dans presque tous les domaines, le travail est devenu ce qui est écrit dans les livres d'économie : un moyen désenchanté de gagner sa vie. Il n'est plus en soi une source de satisfaction.

En introduisant la variable économique, vous perdez le bénéfice de "l'homme moral". D'une certaine manière, c'est aussi ce que le politologue américain Robert Putman, a démontré dans son livre célèbre, Bowling alone, où il regrettait la déliquescence de l'esprit civique américain, à partir des années 1960.
Daniel COHEN, Le Nouvel Observateur, Hors-série, Le pouvoir et l'argent, 11/2012, p. 8.

Dans le livre qui rend [Albert Hirschman] mondialement célèbre, Exit, Voice and Loyalty [en1970], il montre que, même au sein du marché, les décisions des acteurs ne sont pas mues par le seul prix, mais aussi par des valeurs relevant du registre de la morale, comme l'attachement, la fidélité, etc.
Denis CLERC, Alternatives Economiques, 01/2013, p. 79.

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