Moi vouloir Jane...

Sous la surface de l'homme et de son rapport à la violence...
[...] Les êtres humains sont capables d'une violence et d'une cruauté presque inimaginables à l'égard d'autrui [...] mais nous sommes également des créatures éminemment sociables, coopératives, qui ont viscéralement horreur de verser le sang humain. 
[...] Il faut avoir à l'esprit que nos ancêtres ont triomphé non en tant qu'individus, mais en temps que membres de communautés victorieuses. 
[...] Les raids des Yanomami [...est] la forme de guerre probablement menées par nos ancêtres préhistoriques. [Dans cette société tribale d'Amazonie étudiée par Napoléon Chagnon], la guerre est moins le résultat d'un désir de s'approprier les ressources que le produit de tensions psychologiques : jalousie sexuelle, accusations de sorcellerie, désir de vengeance. [...] Les femmes de chaque communauté encouragent les guerriers. C'est un cercle vicieux
[...] Les hommes qui ont tué, ont plus de femmes et plus d'enfants, que ceux qui n'ont pas tué. Napoleon Chagnon. 
[...] Brian Ferguson ou Keith Otterbein ont [...] proposé une hypothèse alternative cohérente, selon laquelle la guerre fut une "invention culturelle" remontant à environ 10 000 ans. 
[Au cours d'un échange] Einstein [écrivit] à Freud : "Vous avez montré avec une lucidité confondante que les instincts agressifs et destructeurs sont inséparablement liés dans la psyché humaine avec ceux de l'amour et du désir de vivre." 
[...] Dans l'immense majorité des cas, les autres espèces ne tuent leurs semblables que dans un combat individuel, en face à face. Pour trouver des prototypes de guerre chez les animaux non humains, il faut se focaliser sur les phénomènes d'"agression de coalition", que l'on trouve par exemple chez les chimpanzés
[...] C'est l'équipe de Jane Goodall, en 1974...
Ahhh... Jane Goodall...
... qui a pour la première fois observé un raid des chimpanzés. [...] Ils sont menés typiquement par une demi-douzaine à une douzaine de mâles [...]. L'un d'eux immobilise la victime et les autres vont à la curée, se livrant souvent à ce que les observateurs humains qualifient de "cruauté gratuite" : ils tordent un membre jusqu'à ce qu'il craque, arrachent la peau, les testicules et les ongles... Books. 
[...] Le guerrier a un double avantage. Non seulement il est particulièrement attirant pour les femmes de sa propre communauté, mais il peut aussi contraindre les épouses et les filles de l'ennemi. Ces deux facteurs ont pu oeuvrer de concert et fournir dans le passé aux hommes les plus violents davantage d'opportunités de se reproduire qu'aux hommes plus policés. Suivant la dynamique bien connu de la sélection sexuelle, les fils de ces unions ont eu toutes les chances d'hériter du tempérament belliqueux de leur père et ainsi, de génération en génération, les gènes de la violence masculine se sont propagés dans la population. David Livingstone Smith.
[...] Les animaux et les plantes emploient quantités de ruses pour se nourrir, se dissimuler et propager leurs gènes. Or, chez l'homme, se tromper soi-même aide à tromper les autres. Un menteur qui croit à ses propres boniments est bien plus convaincant que celui qui n'y croit pas. Cette faculté a donc pu être sélectionnée par l'évolution
[...] La plupart des gens restent indifférents à la majeure partie de la souffrance humaine. Pourquoi ? D'abord, nous sommes plus indulgents à l'égard de ceux qui nous ressemblent.
[...] Ensuite, nous penchons en faveur de ceux avec qui nous entrons en contact direct. [...Enfin], nous favorisons les membres de notre famille parce qu'ils partagent nos gènes.
[...] En même temps, cette préférence pour les membres de notre communauté contribuent à expliquer notre inhibition devant la perspective d'avoir à tuer quelqu'un. 
[...] Nous coopérons pour mieux entrer en compétition, et un haut niveau d'appartenance communautaire nous rend mieux à même de nous unir pour détruire nos rivaux. Robert Bigelow (biologiste).
Une expérience célèbre et édifiante sur la force du lien social >>
[...] Espèce "symbolique", selon l'expression de l'anthropologue Terrence Deacon, l'homme a ajouté une dimension entièrement nouvelle à la guerre, l'idéologie : "Aucun chimpanzé ne peut rêver d'établir une race de maîtres [ou] de conquérir la Terre Sainte [...] ". 
[...] Pour surmonter son horreur de tuer [...] le combattant peut s'immerger dans une forme particulière de mensonge à soi-même. [...] Le remède consiste alors à déshumaniser l'ennemi. [...] Faire de l'adversaire un animal dangereux, infrahumain, [...] un gibier [... ou] un parasite, un virus, un rat, un pou, etc. 
[...] Une autre technique consiste à déformer la réalité de la violence en transférant la responsabilité de l'acte sur une autorité spirituelle ou séculière. En Nouvelle-Guinée, des esprits ancestraux ou totémiques peuvent être présentés comme les véritables auteurs d'une tuerie, le guerrier ayant seulement agi comme véhicule de leurs désirs [...]. 
[J'ai montré] que la thèse suivant laquelle les mâles humains seraient des "tueurs naturels-nés" ne résistait pas à l'analyse. Verser le sang requiert des conditions extrêmes. "I'm a lover, not a fighter", ont confié au sociologue Charles Moskos quantité de soldats américains au Vietnam. [...] Même les chimpanzés manifestent une aversion à tuer leurs semblables. 
Johan Van DER DENNEN (Evolutionary Psychology)Books, 12/2012, p. 25.

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