Où l'on apprend comment dans la zone interdite de Tchernobyl, les organismes peuvent s'adapter au feu de la radioactivité...
[...] Aujourd'hui encore, 3 % des radiations que nous subissons chaque jour, proviennent du nuage de Tchernobyl. [...] Après plus de deux décennies, moins de 3 % des atomes radioactifs subsistent dans la zone interdite de Tchernobyl. Mais ceux qui restent, sont là pour très longtemps. [...] Les doses n'ont plus rien à voir avec celles d'après l'accident, mais elles restent malgré tout encore des milliers de fois supérieures à la normale.
[...] La zone interdite abrite de nombreuses espèces d'animaux sauvages, dont certaines totalement absentes avant l'accident. Les oiseaux nichent même sur le sarcophage de béton qui recouvre le réacteur défunt, à des niveaux de radioactivité 1 000 000 de fois la normale. Mais surtout [...], tous ces animaux semblent en parfaite santé. [...] La végétation est exubérante. [...] Chaque village est redevenu une véritable jungle.
[...] On peut dire que non seulement les animaux vont bien, mais qu'également leur génome n'a subit aucune modification. [...] Il n'y a aucun doute que les organismes de ces animaux qui vivent dans des conditions de radioactivité importante subissent un stress, et que tous leurs systèmes biologiques qui compensent ces dommages sont sollicités au maximum. Mais force est de constater que chaque organisme possède suffisamment de mécanismes de défense qui compensent ces défauts et permettent la survie de l'organisme dans ces conditions.
Les végétaux témoignent d'une première défense naturelle contre la radioactivité...
[...] Le bouleau est très particulier. Son génome, soit l'ensemble de ses chromosomes, n'occupe que très peu de place dans le noyau des cellules. La probabilité pour que les chromosomes soient frappés par radiations est donc faible. En revanche, les conifères possèdent un génome énorme qui occupe beaucoup de place. Les chromosomes ont bien plus de chance d'être heurtés, donc cassés et découpés par les radiations.
Quant aux animaux, alors que les rongeurs et autres mammifères tels les chevaux de Przewalski font preuve d'une santé insolente, les hirondelles semblent affectées par les radiations...
La richesse des espèces [d'oiseaux] était diminuée de moitié dans les zones très contaminées. Et le nombre d'oiseaux par espèce des deux tiers. [...] Anders Molers et Tim Musso ont démontré un vieillissement précoce des hirondelles et une survie d'une année sur l'autre de seulement 30 %. [Ils ont observé] jusqu'à plus de 50 % de spermatozoïdes présentant des morphologies anormales. [...] La plupart des oiseaux [qui s'installent] dans la zone, et en particulier les hirondelles, ont en fait immigré [sur le site], et n'y sont donc pas nés. [Ces populations d'oiseaux] sont maintenues par l'arrivée permanente de nouveaux individus.
L'explication tient à la fatigue des organismes...
Pendant leur énorme effort de migration depuis l'Afrique, les hirondelles consomment une grande partie de leur stock d'anti-oxydants. Or, ces molécules ont un rôle très important dans la lutte contre les radiations. [...] Lorsque les rayonnements découpent les molécules et génèrent ainsi des radicaux libres très toxiques, les anti-oxydants les détruisent. [...] En arrivant à Tchernobyl, dans des zones très contaminées, la quantité d'anti-oxydants [qui restent aux hirondelles], est rapidement consommée pour lutter contre l'avalanche de radicaux libres. Dès que le stock est épuisé, ces radicaux libres vont alors détruire les tissus vivants. Les effets ne tardent pas à être visibles et délétères.
Mais pas seulement...
Nous n'avons tout d'abord pas constaté une augmentation de l'activité des gènes de réparation de l'ADN [...]. Mais à la place, nous avons découvert une modification dans la régulation des gènes responsables de l'élimination des radicaux libres. Les radicaux libres issus de molécules découpées par les radiations gamma, sont éliminés de façon bien plus efficaces. Surtout, ils disparaissent rapidement, avant qu'ils n'aient pu aller détruire les chromosomes. Nous avons également observé une stimulation des gènes dont le rôle consiste à programmer la mort des cellules. Peut-être que [l'organisme des souris exposés au préalable à de faibles radiations] possède un mécanisme plus efficace pour se débarrasser des cellules trop endommagées que celui des souris qui n'ont pas été exposées en amont. [...] Les faibles doses pourraient aussi protéger les souris contre d'autres agressions que les radiations. [En effet], les animaux qui vivent dans la zone de Tchernobyl, soumis en permanence à de faibles doses de radiations, possèdent un système immunitaire qui réagit très rapidement à d'autres agressions ; en particulier à des poisons chimiques.
Arte, Tchernobyl : une histoire naturelle, 21/08/2012.
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