Les détracteurs de la "privatisation de la dette publique par les méchants banquiers", vantent les mérites de dispositions légales abolies depuis la fameuse "loi de 1973", et qui permettaient alors à la France d'emprunter à la Banque de France sans verser d'intérêts et donc sans s'infliger une charge de la dette, source de tous nos maux actuels et prétexte des pourfendeurs de l'Etat providence...
Qu'en est-il réellement ?
Mensonge n° 1 : il ne s'est strictement rien passé de nouveau en 1973 par rapport à 1936. Olivier BERRUYER, Les faits sont têtus, Les arènes, 2013, page 227.
C'est vrai. Et tous ceux qui font leur choux gras de la loi 1973 sans en parler doivent justifier cette omission, qui leur permet, par exemple, de singulariser cette loi à grands renforts d'antisémitisme (via la banque Rothschild)...
Et pour cause : [la fameuse interdiction] a [en réalité] été introduite par la loi du 24 juillet 1936. L’article 13 de ladite loi précise en effet que « Tous les Effets de la dette flottante émis par le Trésor public et venant à échéance dans un délai de trois mois au maximum sont admis sans limitation au réescompte de l’Institut d’Émission, sauf au profit du Trésor public. ». Contrepoints.org
En langage courant...
Quand un acteur avait besoin de liquidités, il demandait à la Banque de France d’escompter des titres de créance : l’acteur échangeait une obligation contre des liquidités. Si par exemple, un acteur X possédait une obligation française qui serait remboursée cinq ans plus tard, celui-ci pouvait demander à la Banque de France de lui avancer cette somme en échange de la promesse de rembourser quand l’obligation arriverait à maturité. Très pratique lorsque l’on avait besoin de liquidités rapidement.
Cet article [de juillet 1936] énonce une règle simple : le Trésor public ne peut pas présenter ses propres obligations à la Banque de France. Il doit donc chercher des liquidités ailleurs [...] Contrepoints.org
L'article en question sur ce pdf disponible sur le site de la Banque de France...
Mensonge n° 3 : l'Etat n'a jamais utilisé la Banque de France comme banquier pour financer à long terme ses déficits. Olivier BERRUYER, Les faits sont têtus, Les arènes, 2013, page 228.La preuve dans les fameux graphiques d'Olivier Berruyer...
En tant que banquier d'un client qui n'a guère de trésorerie (au vu de ses déficits permanents), la Banque a toujours accordé de légers découverts à l'Etat, afin qu'il puisse payer les salaires le temps que les impôts rentrent. L'Etat a aussi emprunté des sommes plus importantes, mais dans des circonstances dramatiques : les deux guerres mondiales. Olivier BERRUYER, Les faits sont têtus, Les arènes, 2013, page 227.
Instructif. Cependant, les pourfendeurs de la loi de 1973, ne pointent pas tant l'impossibilité de faire du déficit à gogo, que les conséquences du déficit à travers les prêts à intérêts rendus obligatoires, selon eux, par cette loi...
Voici les deux courbes qui illustrent le mieux leur propos...
Et les conclusions qu'ils en tirent...
"... La maîtrise privée de la création monétaire est un verrou diabolique qui interdit en profondeur le droit des peuples à disposer d'eux-même." Etienne Chouard, Préface à La Dette Publique, une affaire rentable. André-Jacques HOLBECQ, Editions Yves Michel, 2011, p. 12.
"En abandonnant au secteur bancaire le droit de créer de la monnaie, l'Etat s'est privé en moyenne d'un pouvoir d'achat de annuel représentant environ 5,2 % du revenu national." Maurice Allais. La Dette Publique, une affaire rentable. André-Jacques HOLBECQ, Editions Yves Michel, 2011, p. 55.
[Le service de la dette de l'Etat], c'est prélever sur notre travail et notre production plus de 120 millions d'euros par jour, [...] et le transférer à ceux qui sont déjà les plus riches, qui d'ailleurs peuvent ainsi nous le reprêter à nouveau contre intérêt...". André-Jacques HOLBECQ. La Dette Publique, une affaire rentable. Editions Yves Michel, 2011, p. 67.
Etc, etc... Disons pour simplifier leur propos, qu'en empruntant gratis à la Banque de France, le déficit, à défaut d'être résorbé, aurait au moins été contenu...
Il faut cependant peut-être relativiser cette conclusion...
[...] Sur les 1800 milliards de dette actuelle, environ 1100 milliards sont dus uniquement à la charge d'intérêt de la dette (qui pour rappel est d'environ 50 milliards d'euros par an sur les 5 dernières années).
[...] L'idée sous-jacente est de se dire que si la France n'avait pas payé d'intérêt sur sa dette, comme cela était techniquement possible avant 1973, alors la dette de la France ne serait "que" de 700 milliards d'euros ! Et indirectement donc, que les 1100 milliards d'intérêt versés par l'Etat depuis 1973 (donc par le contribuable) ont servi à enrichir "les banquiers".
Comme on peut le voir graphiquement, la dette actuelle en pourcentage du PIB se situe dans les pays développés (courbe orange) à peu près au même niveau qu'à la fin de la seconde guerre mondiale. Graphiquement, on note une hausse dans l'ensemble des pays du monde de la dette en pourcentage du PIB à partir des années 1975 / 1980. La situation est la même partout dans le monde, malgré le fait que certains pays aient adopté bien avant ou bien après 1973 une loi du même type que la loi Giscard-Pompidou française. Cela plaide donc en faveur de l'hypothèse du Captain' comme quoi cette fameuse loi française de 1973 n'est pas LA cause de l'endettement français. CaptainEconomics.fr
Sans oublier le supposé manque de compétences de nos politiques...
Alors oui, si l'Etat s'était endetté à 0 %, il n'y aurait pas de dette publique aujourd'hui, en théorie ; en pratique, gageons que cela aurait été un prétexte pour dépenser plus et générer quand même une dette publique élevée, par facilité et irresponsabilité. Olivier BERRUYER, Les faits sont têtus, Les arènes, 2013, page 237.
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