Produit volatile...

[...] Les transactions se font de manière bilatérale, sans passer par un marché transparent. Les produits dérivés vont ainsi générer du risque supplémentaire pour le système dans son ensemble. Il est donc faux de dire que, d'un point de vue systémique, ils réduisent les risques. D'ailleurs le développement de ces produits n'a pas diminué la volatilité des marchés financiers.
Pascal CANFIN (2012), Ce que les banques vous disent..., Les petits matins, p. 76.

Banque en or...

Le réseau de la Banque de France [est] le plus dense d'Europe et ses charges d'exploitation sont six fois supérieures à celles de la Banque d'Angleterre. Le comité d'entreprise est l'un des mieux dotés de l'Hexagone : près de 70 millions d'euros de dépenses annuelles pour 13 000 agents.
L'Express, 04/2012, p.66.

Des clopinettes...

Le tabagisme coûte plus de 18 milliards d'euros par an à l'assurance maladie et provoque plus de 60 000 décès prématurés.
L'Express, 04/2012, p.62.

La fin des ca...Q.I...ètes...

Les résultats des pays scandinaves montrent que le Q.I. a atteint un pic, voire est en léger déclin. [...] Plusieurs pays avancés, comme les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, montrent toujours une progression forte. James FLYNN (professeur émérite à l'université d'Otago, Nouvelle-Zélande). 
Pour autant, certains signent indiquent que ce plafonnement est une tendance lourde.
[...En France, par exemple], les scores de Q.I. ont, entre les années 1980 et 2000, comme ailleurs dans le monde, évolué à la hausse... mais à un rythme déclinant.
Pendant qu'un indicateur clé de l'intelligence (les scores de Q.I. total) flanche dans deux pays de l'OCDE, trois indicateurs d'une intelligence plus scolaire [le Pisa] sont en panne de progrès chez tous ses pays membres. 
[Certains pointent] les nouvelles technologies de l'information [...] qui se sont immiscées dans nos vies. 
[...] Des chercheurs de l'université Columbia, à New York, ont par exemple montré que l'accès à internet nous pousse à moins mémoriser l'information en elle-même que le chemin qui y mène. Une "mémoire transitive" qui pourrait, en devenant le mode de traitement privilégié de l'information, dégrader les scores à certains tests d'intelligence. 
[...] Joe Sundet et Thomas Teasdale privilégient un facteur éducatif : les cursus scolaires en mathématiques ont évolué au fil des années [et] le nombre d'individus poursuivant des études supérieures [a reculé au profit] des filières plus courtes
Linda Gottfredson [parle quant à elle] d'un "budget métabolique" que les progrès de l'agroalimentaire et de la médecine dans les pays développés auraient si bien pourvu qu'il nivellerait désormais l'intelligence par le haut. Bien nourris et bien soignés, les cerveaux scandinaves donneraient dorénavant le meilleur d'eux-même [...]. 
Le monde est surtout compliqué quand on ne le comprend pas. Le ressort essentiel de l'intelligence n'est pas la performance chronométrée telle que la mesure les tests psychométriques, mais sa capacité de conceptualisation. [...] Nous avions le même cerveau au XVIIIe siècle, et pourtant les élèves de quatrième sont aujourd'hui à l'aise avec des notions qui ont dérouté les contemporains de Descartes pendant près d'un siècle. L'intelligence requalifie sans cesse le complexe en simple. Aussi, je doute que ses limites soient proches d'être atteintes. Joël BRADMETZ (du département de psychologie de l'université de Reims).
[...] Pour Andy Clark, professeur de logique et métaphysique à l'université d'Edimbourg, c'est justement l'interaction féconde entre les technologies de l'information et notre cerveau qui constituerait le meilleur ressort de l'intelligence. Son argument ? Le fait qu'un aperçu en haute définition de ce qui se trouve devant nos yeux par une zone très étroite de la rétine (la fovéa) suffit à notre cerveau pour reconstruire une scène globale, en ne retenant des "mini-scènes" obtenues à chaque saccade des yeux que ce qui est utile.
François LASSAGNE, Science & Vie, 04/2012, p. 53.

La réflexion se poursuit, plus particulièrement au sujet de l'éducation des enfants >>

Partager moins pour gagner plus...

Au début des années 1980, les dirigeants politiques ont rompu avec la dynamique et les préceptes mis en oeuvre après la Seconde Guerre mondiale. Ils ont choisi le néolibéralisme. A l'heure où beaucoup s'indignent sur les conséquences de ce choix, comment expliquer qu'à l'époque, cette théorie ait pu séduire et être adoptée ?

Les Trente Glorieuses...
Autrefois, les progressistes [la gauche aux États-Unis] avaient la réputation d'être des durs de la lutte contre l'inflation. Un de leurs grands triomphes de la Seconde Guerre mondiale, notamment quand on pense à l'échelle de la mobilisation et des combats, avait été de faire cette guerre en maintenant des prix à peu près stables. Ils y étaient parvenus par le contrôle, le contrôle rigide, des prix, des salaires et des loyersJ.-K. GALBRAITH  (2009). L'Etat prédateur, Seuil, p.71.
Au moment de la reconstruction de l'Europe après la Deuxième Guerre mondiale, les puissances occidentales adoptèrent le principe suivant : les économies de marché devaient garantir une dignité élémentaire suffisante pour dissuader des citoyens désillusionnés de se tourner de nouveau vers une idéologie plus attrayante, qu'elle fut fasciste ou communiste. C'est cet impératif pragmatique qui présida à la création de la quasi-totalité des mesures que nous associons aujourd'hui au capitalisme "humain", la sécurité sociale aux États-Unis, la régime public d'assurance-maladie au Canada, l'assistance publique en Grande-Bretagne et les mesures de protection des travailleurs en France et en AllemagneNaomi KLEIN (2008), La stratégie du choc, Actes Sud, p. 73.
Les accords de Bretton Woods sont signés en 1944 par les pays alliés victorieux de l'Allemagne nazie afin de préparer l'ordre économique et financier de l'après-guerre. Le dollar y fut défini comme la monnaie internationale, convertible en or selon un taux fixe de 35 dollars l'once. Les États-Unis s'engageaient ainsi à vendre toute quantité d'or demandée par un État [contre ses dollars], à ce prix. Jean DE MAILLARD (2010), L'arnaque, Gallimard, p.294.
Dans les décennies qui ont suivi [la Seconde Guerre mondiale], jusqu'à l'ère Reagan, [les progressistes] avaient continué à faire usage de l'encadrement des salaires et des prix, d'interventions spécifiques contre des chocs inflationnistes, et, dans certaines périodes, du contrôle total. J.-K. GALBRAITH (2009). L'Etat prédateur, Seuil, p.71.
Durant cette période, la politique économique keynésienne est donc apparue comme une réussite, mais elle reposait sur des facteurs structurels : l'ampleur des gains de productivité, la force de la demande, l'autonomie des pays les uns par rapport aux autres. Henri STERDYNIAK (2011), Les économistes atterrés, LLL, p. 26.
Pour les patrons des multinationales américaines, confrontés à des pays en voie de développement  beaucoup moins accueillants que naguère et à des syndicats plus puissants et revendicateurs, les années de l'après-guerre furent particulièrement éprouvantes. L'économie connaissait une croissance rapide et créait une richesse considérable, mais les propriétaires et les actionnaires devaient en redistribuer une grande partie en impôts et salaires. Tout le monde se tirait bien d'affaire, mais un retour aux conditions d'avant le New Deal aurait permis à quelques-uns de s'enrichir encore davantage. Naomi KLEIN (2008), La stratégie du choc, Actes Sud, p. 74.
La fin des haricots...
Mais à la fin des années 1970, ce système avait trouvé ses limites. Et l'inflation qu'il n'a pu maîtriser a détruit la réputation économique de la génération libérale [la gauche aux États-Unis] qui a pris le pouvoir sous John Kennedy et l'a perdu avec Jimmy Carter. J.-K. GALBRAITH (2009). L'état prédateur, Seuil, p.71.
Le fait historique qui a donné le coup d'envoi à l'explosion de l'inflation des années 1970 a été, de toute évidence, l'explosion des prix du pétrole en 1973. [...] Il est tout à fait plausible qu'elle ait été provoquée par les changements intervenus dans le système financier international à peine quelques mois plus tôt. J.-K. GALBRAITH (2009). L'état prédateur, Seuil, p.75.

Profitant de sa position privilégiée d'émetteur de la monnaie internationale [...], l'Amérique a émis après guerre des dollars sans se préoccuper de l'équivalence de ses réserves d'or. Rapidement elle ne put faire face aux demandes de remboursement d'or et, quand la situation devint intenable, Richard Nixon suspendit unilatéralement la convertibilité le 15 août 1971, marquant ce qui est considéré comme le coup d'envoi de la mondialisation et la mort du système de Bretton Woods. Jusqu'à cette date, les monnaies nationales devaient respecter une discipline sous le contrôle du FMI, notamment en matière de dévaluation. Après le 15 août 1971, les monnaies se sont mises à « flotter » et toute discipline collective a disparu. Jean DE MAILLARD (2010), L'arnaque, Gallimard, p.294.
[Il s'agit] pour les États-Unis, d'une mesure sans précédent, qui a immédiatement fait monter les prix, mesurés en dollars, des marchandises échangées dans le monde entier. [...] Au départ, les prix du pétrole, qui étaient fixés en dollars par un cartel, ne se sont pas inscrits dans ce mouvement et sont restés stables. Mais cela voulait dire que les producteurs de pétrole subissaient l'inflation des prix de tout ce qu'ils consommaient. En 1973, à la suite de la guerre du Kippour, l'OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) a répliqué en quadruplant le prix du pétrole. [...] Les prix [de l'or noir] et des matières premières ont alors déclenché une spirale haussière dans l'économie américaine, par le biais des échelles mobiles (l'indexation sur le coût de la vie) qui étaient intégrés aux accords salariaux. C'est ce processus qui a créé l'inflation. Elle n'est pas née à la banque centrale [Galbraith fait ici référence à la thèse des conservateurs voulant que l'inflation soit due à une trop grande émission de monnaie, en particulier sous l'impulsion des ambitions électoralistes des homme politiques]. J.-K. GALBRAITH (2009). L'Etat prédateur, Seuil, p.75.
Le concept...
[...] L'idée force est venue de Milton Friedman [figure de proue des économistes de l'école de Chicago]. "L'inflation, a-t-il écrit dans une formule célèbre, est toujours et partout un phénomène monétaire". [...] Les monétaristes supposaient un rapport simple de cause à effet entre les émissions de monnaie et les changements du niveau moyen des prix. J.-K. GALBRAITH (2009). L'Etat prédateur, Seuil, p.71.
Au coeur des enseignements sacrés de l'école de Chicago figurait la conviction suivante : les forces économiques, l'offre et la demande, l'inflation et le chômage, s'apparentent aux forces de la nature, fixes et immuables. Au sein du libre marché absolu imaginé dans les cours et les manuels de l'école de Chicago, ces forces sont en équilibre parfait, l'offre influant sur la demande, à la manière dont la lune influe sur les marées. Si l'économie était victime d'une inflation élevée, c'était toujours, selon le strict monétarisme de Friedman, parce que des décideurs mal avisés avaient laissé entrer trop d'argent dans le système au lieu de permettre au marché de trouver son propre équilibre. De la même façon que les écosystèmes se régissent et s'équilibrent eux-même, le marché, pour peu qu'on le laisse se débrouiller sans ingérence, créera, au juste prix, la quantité précise de produits requise. Les produits en question seront fabriquées par des travailleurs qui gagnent exactement assez d'argent pour pouvoir les acheter, bref, c'est l'Eden du plein emploi, de la créativité illimitée et de l'inflation zéro. Naomi KLEIN (2008), La stratégie du choc, Actes Sud, p. 68.
Les économistes ultralibéraux de l'école de Chicago avaient remis à la mode le modèle du "marché efficace" en modernisant la théorie de l'"équilibre général" formulée en 1874 par Léon Walras. Celui-ci assimilait l'univers économique à l'univers physique décrit par Newton. L'école de Chicago entendait renouer avec la pensée libérale, mise à mal par Marx et Keynes, en lui donnant une formulation mathématique à partir de la croyance fondamentale en un individu rationnel, seul capable d'adapter avantageusement les moyens qu'il emploie aux fins qu'il s'assigne. J.-P. CHEVENEMENT (2011), La France est-elle finie ? Fayard, p.23.
Du principe général, des leçons précises de politique économique ont été tirées. Notamment celle-ci : la politique monétaire devait se donner pour seul objectif de lutter contre l'inflation, les budgets devaient être en équilibre, le libre-échange devait présider au commerce, les impôts sur l'épargne et les accumulations privées devaient être légers. Et surtout, l'État devait être faible, et "intervenir" aussi peu que possible dans le fonctionnement des marchésJ.-K. GALBRAITH (2009). L'état prédateur, Seuil, p.12.
Sur le plan théorique, la restauration libérale s'est appuyée sur la contre-révolution monétariste. L'État ne doit pas se donner pour objectif de maintenir en permanence, le plein emploi, car cela génère un rapport de force trop favorable aux salariés. Il faut accepter un certain niveau de chômage, le taux de chômage naturel, pour discipliner les hausses de salaires. Ce taux doit être d'autant plus élevé que les travailleurs sont exigeants. Si la part des profits s'est détériorée, une phase temporaire de fort chômage est nécessaire. L'objectif de la politique macroéconomique n'est donc plus le plein emploi, mais la rentabilité des entreprisesHenri STERDYNIAK (2011), Les économistes atterrés, LLL, p. 26.
Pourquoi la sauce a-t-elle prise ?
[Les conservateurs] s'engageaient donc [...] à en finir avec un type de politique qui exaspérait de nombreux membres de l'élite (et cela, soyons francs, dans les deux grands partis) : celle du compromis, de la redistribution, de la réponse aux besoins et aux revendications des minorités et des pauvres. L'Amérique des années 1980 était fatiguée de la compassion. J.-K. GALBRAITH (2009). L'état prédateur, Seuil, p. 27. 
Si Walter Wriston, président de la Citibank et ami personnel de Friedman, avait plaidé en faveur de l'abolition du salaires minimum et de l'impôt des sociétés, on l'aurait naturellement accusé d'être un vil exploiteur. C'est là qu'intervient l'école de Chicago. Il apparut rapidement que les mêmes arguments, défendus par Friedman, brillant mathématicien et redoutable orateur, prenaient une tout autre dimension. On pouvait les rejeter en les qualifiant d'erronés, mais ils bénéficiaient d'une aura d'impartialité scientifique. Le point de vue de l'entreprise passait désormais par le filtre d'établissements universitaires ou quasi-universitaires. L'école de Chicago croulait sous les dons. Bientôt elle accoucha du réseau mondial de think tanks conservateurs qui allaient abriter et nourrir les fantassins de la contre-révolution. Naomi  KLEIN (2008), La stratégie du choc, Actes Sud, p. 75.
[L'influence des travaux des économistes de l'école de Chicago] s'étend quand, parvenus à la maturité, leurs élèves peuplent les conseils économiques de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher, colonisent les institutions de Bretton Woods, dont la Banque mondiale et le FMI, se multiplient dans les entourages de maints dirigeants de pays développés comme de pays en voie de développement, du Chili au Brésil. Loïc 
BELZE, Philippe SPEISER (2007), Histoire de la finance, Vuibert, p. 476.
Naturellement, la victoire du néolibéralisme, au début des années 1980, a beaucoup tenu à l'épuisement idéologique de ses adversaires, de l'URSS, mais aussi de la social-démocratie traditionnelle. Affaiblissement de l'Union Soviétique d'abord, sensible tout au long des années "Soljénitsyne" [...]. Épuisement aussi de la social-démocratie classique telle que l'incarnait, en Grande-Bretagne, le parti travailliste de Harold Wilson et de James Callaghan. Peter Sloterdijk a très bien montré comment la social-démocratie des années 1970 n'arrivait plus à rentabiliser la menace évanescente d'une URSS à bout de souffle, et comment le néo-libéralisme, en définitive, a été aussi un "nouveau calcul des coûts de la paix intérieure" : il était temps de baisser le coût des salaires et de rétablir le niveau des profits, quitte à accepter la charge économique d'une population d'exclus politiquement démotivés. J.-P. CHEVENEMENT (2011), La France est-elle finie ? Fayard, p.20.
[…] La mondialisation commerciale permet de conjuguer accroissement des chiffres d'affaires des entreprises mondialisées et augmentation parallèle des taux de profit. […] En régime de libre-échange mondial, les entreprises ont la faculté de choisir, toutes conditions égales par ailleurs, les sites de production où la ressource humaine est la moins chère. La rémunération du travail peut alors être déconnectée de la productivité. [...] Le projet apparemment audacieux du libre-échange mondial n'a pas vu le jour parce que les dirigeants politiques l'ont pensé comme une nécessité de développement de leurs économies nationales ou continentales, mais parce que les actionnaires les plus influents au sein des grandes bourses se sont mobilisés pour l'imposer. J.-L. GREAU (2008), La trahison des économistes, Gallimard, p.48. 
Si on se limite à l'Europe, on peut aligner les raisons. La principale me semble être l'idée, empruntée à Montesquieu, que c'est d'abord en tissant des liens économiques puissant entre les pays qui la composent, et singulièrement la France et l'Allemagne, qu'on éviterait désormais les guerres. Cet argument du "doux commerce", qui fait de l'économie la continuation de la politique par d'autres moyens, n'est pas à rejeter d'emblée, mais lorsqu'il se déploie dans une économie mondialisée, dominée par le capitalisme financier dont les temps de réaction sont minuscules par rapport à ceux du pouvoir politique, celui-ci découvre trop tard qu'il a introduit le loup dans la bergerie.
[...] Je situe la rupture intellectuelle au moment où la philosophie politique est devenue une question de choix rationnel entre des options, notamment avec la fondation de la théorie du choix social par Kenneth Arrow en 1951 et la publication du livre de John Rawls, Théorie de la justice, en 1971. Jean-Pierre DUPUY, Alternatives Economiques, 06/2012, p. 76.
Au détour d'un article sans rapport avec la question, les origines de la nation américaine expliquent peut-être aussi dans une certaine mesure pourquoi elle a constitué un terreau si favorable au libéralisme...
A l'origine, en tant que colonie, pour gagner leur indépendance, les Etats-Unis, on dû se défaire de l'emprise de l'Etat, l'Empire britannique en l'occurrence. [...] L'emprise impériale disparue, un cadre politique devait être trouvé pour garantir cette liberté. Dick HOWARD (propos recceuillis par Marc-Olivier BHERER, Le Monde, 05/11/2013, p. 18.

T'as de belles lèvres, tu sais...

Les bébés apprendraient en lisant sur les lèvres des adultes qui les entourent, selon une étude américaine menée auprès de 179 bébés de 4 à 12 mois. Les psychologues ont montré aux enfants des vidéos dans lesquelles une femme s'exprimait, soit dans leur langue maternelle, soit dans une langue étrangère, puis ils ont enregistré leurs mouvements oculaires. A six mois, les bébés ont concentré leur regard sur les lèvres de leur locutrice, quelle que soit la langue parlée, A un an, une fois les sons de base maîtrisés, ils ont regardé ses yeux lorsqu'elle parlait leur langue, mais sont repassés à la fixation des lèvres en l'entendant parler un autre idiome.
L'Express, 04/2012, p. 34.

Hobbes en 4x4...

Des chercheurs ont observé à leur insu plus de 400 conducteurs à l'approche d'un carrefour et d'un passage piéton, et ont soumis plusieurs centaines de personnes à des expériences en laboratoires sur leurs penchants à se comporter de façon non éthique.
Les membres des classes supérieures auraient tendance (et ils l'assument) à mentir, tricher, enfreindre davantage le code de la route que ceux des classes moins élevées. La "richesse" rendrait bien plus individualiste et insoucieux des conséquences de ses actes.
[...] Ces différences s'estompent si on demande à tous les participants d'envisager les bénéfices que leur rapporterait un comportement non éthique.

Phosphore addict...

[Une étude (à ce jour controversée)] de chercheurs de l'Institut for sustainable futures (Australie) annonce un pic de production du phosphore au milieu des années 2030, au vue de la consommation actuelle couplée à l'épuisement des gisements de qualité à travers le monde.
Sans phosphore, pas de  vie sur Terre. [...] Cet élément forme la structure même de l'ADN, pilote la respiration, la photosynthèse chez les plantes, ou encore le métabolisme cellulaire. Chaque humain en réclame deux grammes par jour. [Nous le puisons] dans l'alimentation, végétale ou animale.
L'humanité a toujours recyclé le phosphore, sans le savoir, en réutilisant comme engrais les excréments des animaux, mais aussi ceux des hommes, qui en sont riches. Une époque où tous les cultivateurs étaient aussi éleveurs.
Au début du XIXe siècle, alors que des famines apparaissent et qu'il devient urgent d'augmenter les rendements, le guano est alors mis à contribution jusqu'à épuisement. Puis vint le tour du minerai de phosphate, dont l'usage n'est pas pour rien dans la multiplication de la population mondiale par quatre au XXe siècle.
Sur 15 millions de tonnes de phosphore épandues chaque année, seuls 3 millions parviennent jusque dans nos assiettes. Pis, ces 3 millions de tonnes, une fois rejetées par le corps humain, ne retournent plus aux terres arables. Urbanisation oblige, ce phosphore excrété, s'en va à travers les égouts pour se perdre, in fine, dans les fonds marins.
[Selon Andrea Ulrich de l'Ecole polytechnique de Zurich], ignorer ce problème pourrait mettre en péril la sécurité alimentaire mondiale.
BELLANGER B et NOUYRIGAT V. (2012), Science & Vie, 05/2012, p. 62.

Exclusion...

En France, on a exclu les syndicats des conseils d'administration des entreprises. Si je vous exclu, vous vous opposez à moi. Les syndicats se sont donc inévitablement tournés vers l'opposition.
France Inter, 3D le journal, 22/04/2012.

Roullande et Sarkobbes...

Pour Hobbes, lorsque les individus quittent l'existence "sauvage, misérable et brève" de l'état de nature [dans lequel "l'homme est un loup pour l'homme" (formule antique empruntée à Plaute)] pour se placer sous l'autorité de l'Etat, c'est un raisonnement individuel qui les relie : "J'abandonne mon droit de me gouverner à cet homme ou à cette assemblée à condition que tu abandonnes ton droit et autorise ses actions de la même manière." Je stipule que l'autre se comportera comme moi, je n'échange pas véritablement avec lui. Dans la tradition libérale, la vie sociale est ainsi toujours comprise comme une série d'actes individuels qui lie l'individu à l'Etat, non comme une métamorphose réelle de chacun par une intégration dans le collectif.
Rousseau, [pour sa part,] considère que la dynamique compétitive n'est pas une donnée naturelle mais le produit d'une histoire contingente. En s'inspirant de la bonté naturelle de l'homme et de son aspiration à la paix, il est possible et légitime de s'opposer à la compétition pour retrouver la concorde naturelle perdue. Le contrat se conçoit alors comme association au sens fort par laquelle chacun "s'unit véritablement à tous". La force de l'Etat ne se définit plus par la sécurité intérieure et extérieure, elle se mesure au degré de participation des citoyens à la vie publique.
LEGROS M. (2012), Philosophie Magazine04/2012, p. 41.

Les loups à droite, les agneaux à gauche...

Raffaele Simone nous explique pourquoi l'homme est par essence égoïste et agressif et que la civilisation le rend coopératif et empathique...
[...] Les valeurs de droite sont "naturelles", au sens où elles sont primaires, ce sont bien les mêmes principes  qu'on retrouve à la base du comportement des petits enfants. Quant aux valeurs de gauche, ce sont toujours des réactions à ces élans primaires, elles sont donc secondaires.
[...] En Occident, depuis le siècle des Lumières, la culture et l'éducation ont lutté de concert contre les instincts égocentriques, égoïstes, agressifs des êtres humains en général et des enfants en particulier.[...] La culture actuelle ne semble plus concentrée sur la maîtrise des instincts archaïques, mais, au contraire, elle les flatte. 
[...] Nous éprouvons de moins en moins de sentiments à l'égard de notre prochain, même sa mort nous est d'autant plus indifférente que nous vivons environnés d'écrans, sur lesquels le monde se transforme en pixels. Dans une ère dominée par les images numériques, les valeurs de solidarité sont remisées à l'arrière-plan. Tuer ne comporte aucun coût moral, si on le fait dans un jeu vidéo ou dans un petit film sur YouTube
[...] La nature humaine est égocentrique et agressive [...]. La psychologie infantile et l'observation de la vie familiale [le prouvent]. Les enfants, surtout lorsqu'ils sont petits, tendent à se poser au premier plan, à solliciter l'attention des autres et à manifester leur dépit en cas de frustration. 
[...] L'empathie me paraît une motivation secondaire, l'expression dérivée, intelligente, de l'instinct de préservation de conservation [...]. 
[...] Au départ, l'homme est de droite, c'est-à-dire égoïste et prédateur, mais, pour des raisons variées qui ont beaucoup à voir avec la peur et l'instinct de survie, il acquiert le goût de la coopération et même de la paix, qui ont des avantages évidents sur la guerre perpétuelle. Dans ce sens, je suis hobbesien, oui [...]. 
[...] Quels sont les fondamentaux conceptuels de la droite ? J'en citerai cinq : le postulat de supériorité ("moi je suis le premier, tu n'es personne") ; le postulat de propriété ("ça c'est à moi, et tu n'y touches pas") ; le postulat de liberté ("je fais ce que je veux comme je veux") ; le postulat de non-intrusion dans la vie de l'autre ("ne te mêle pas de mes affaires") ; le postulat de supériorité du privé sur le public ("chacun pour soi et tant pis pour le bien commun"). La gauche combat tous ces postulats : elle oppose l'égalité et la valeur du "nous" aux prérogatives du "moi-je" ; elle propose de corriger la propriété par la redistribution ; elle n'exclut pas de poser des limites à la liberté, car il faut proscrire toutes les conduites contraires au bien commun ; la gauche prône en général le droit d'ingérence dans les affaires d'autrui au nom de l'intérêt général ; enfin, elle affirme que l'intérêt public doit l'emporter chaque fois qu'il entre en conflit avec les intérêts privés. 
[...] Les valeurs de droite sont "naturelles", au sens où elles sont primaires, ce sont bien les mêmes principes  qu'on retrouve à la base du comportement des petits enfants. Quant aux valeurs de gauche, ce sont toujours des réactions à ces élans primaires, elles sont donc secondaires
[...] La droite n'est plus du côté de la sévérité et du respect des traditions, mais de l'enrichissement rapide, de la compétition acharnée ; elle en appelle au peuple, à ses goûts et à ses aspirations. [...] En face d'elle, la gauche, qui continue à défendre l'importance du savoir, de l'éducation, du public, de la solidarité envers les plus démunis, et les étrangers, qui prêche l'impôt comme source de redistribution [...] n'a que du renoncement à proposer ; elle a donc, par rapport aux goûts mis en circulation par notre époque, quelque chose de pénitentiel.
Raphaele SIMONE (propos recueillis par Alexandre LACROIX), Philosophie magazine05/2012, p. 59

Pays du Soleil couchant...

Il y a 20 ans, on nous disait que le Japon allait dominer l'économie mondiale. Depuis que la crise immobilière a éclaté, c'est-à-dire il y'a 18 ans, ils ont 0,6 % de croissance par an en moyenne. Alors que c'est le pays qui fait le gros effort de recherche (et c'est très bien) avec 3 % du PIB, ils appliquent à fond [dans le même temps] les recettes classiques : gros déficits et plans de relance, du béton partout, taux d'intérêt à 0 %. On est tous en train de tomber dans la même trappe.
France Inter, 3D le journal, 15/04/2012.

La faute à milton...

Si l'on est en crise depuis 5 ans, c'est parce que depuis 30 ans, on partageait mal la croissance. On ne sortira pas de la crise si l'on n'arrive pas à poser la question d'un autre partage des richesses et d'un autre partage des gains de productivité. Avant l'arrivée des néolibéraux en 1981 aux Etats-Unis, les comptes étaient équilibrés. Il n'y avait besoin ni de dette privée, ni de dette publique.
 France Inter3D le journal, 15/04/2012.

Old Bérézina...

Lorsque Roosevelt arrive au pouvoir en 1933, c'est la bérézina. 14 millions de chômeurs, la plupart des gens croient qu'il n'y a plus de mesure politique possible, aucune solution, parce que Hoover, président précédent n'avait rien fichu. Il parlait beaucoup mais ne faisait rien. Roosevelt, en trois mois, fait passer 15 réformes et montre qu'on peut changer le monde.
France Inter3D le journal, 15/04/2012.

Bombe immobilière...

La bulle immobilière est en train d'exploser en Chine. En Espagne, [elle a conduit] Zapatero à démissionner, en Chine, la réponse du gouvernement n'est pas "on change le modèle social", "on fait des élections", c'est "on double le budget militaire d'ici 3 ans"...
France Inter, 3D le journal, 15/04/2012.

L'oeuf ou la poule ?

Dans la série "Je vous explique la crise" : Pierre Larrouturou...
Avant l'arrivée des néolibéraux, pendant 30 ans, [...] sans idéaliser ce qu'a fait Roosevelt, parce que tout ne marchait pas [...], le système était équilibré. Il n'y avait besoin ni de dette privée, ni de dette publique, parce qu'il y'avait des règles sociales. Avec l'arrivée des néolibéraux, on a supprimé ces règles sociales qui assuraient [...] que chacun avait un vrai boulot [...], et le fait que le salaire augmentait chaque année comme la productivité. Au nom de la liberté individuelle [...] les néolibéraux ont surfé sur le besoin de liberté et nous ont expliqué que c'était par la liberté individuelle qu'on allait négocier les salaires. Or la liberté de négocier quand tout le monde a la trouille d'être au chômage, [...] dans beaucoup d'entreprises, c'est "si t'es pas content, t'as qu'à aller voir ailleurs". [...] Pendant un moment, on a caché le problème par la dette privée [pour que les ménages continuent de pouvoir consommer]. Et puis les ressources de l'Etat ont aussi diminué, parce que la première ressource de l'Etat, ça vient des salaires, de la TVA, de la consommation. [...] La cause fondamentale de la crise, c'est le chômage et la précarité qui déséquilibrent la négociation ("si t'es pas content, va voir ailleurs"), les dividendes explosent et ce qui va à monsieur et madame tout-le-monde est beaucoup trop faible.

Vieilles croûtes...

Dans les 100 premières entreprises en France, combien sont là depuis moins de 30 ans ? On a un taux de naissance d'entreprises très élevé, 600 000 par an mais aucune n'a moins de 30 ans (Europe 9 %, USA 63 %).
France Inter, 3D le journal, 15/04/2012.

Stérilité ?

[...] Du point de vue économique, celui qui gagne 200 000 euros par mois, même s'il va trois fois par jour au restaurant, il ne peut pas tout consommer, donc 80 % de son argent est stérilisée.
Pierre LARROUTUROU, France Inter, 3D le journal, 15/04/2012.

Sale petit innovateur...

La France a d'excellentes formations. Nos chercheurs, nos ingénieurs en systèmes d'information, nos designers sont recherchés dans le monde entier, mais la France ne sait pas quoi en faire. Les entreprises disent il nous faut des innovateurs, mais elles ne savent pas les intégrer en leur sein car l'innovateur ne se comporte pas comme un bon petit soldat.
France Inter3D le journal, 15/04/2012.

Froussards...

Le système français ne sait promouvoir ni l'innovation d'intégration, ni l'innovation de rupture. Quand vous regardez la manière de sélectionner ou de promouvoir les projets de recherche, on regarde par rapport à ce qui existe et on ne sait pas faire confiance en ce qui n'existe pas parce qu'on a peur du risque.
France Inter3D le journal, 15/04/2012.

Daiichi et Daini sont sur un bateau...

Au sujet de Fukushima [...], personne ne rappelle un point fondamental : si la centrale de Fukushima Daiichi a connu les graves problèmes que l'on sait, celle de Fukushima Daini, située un peu plus au sud, s'est mise en sécurité dès le début du tsunami. La première centrale a été construite en 1971, la seconde en 1983 avec une technologie très différente, notamment pour ses installations de sécurité.
On pourrait en tirer la conclusion que le nucléaire est sûr avec des centrales récentes et donc que l'accident du 11 mars pèserait en faveur de cette énergie.
DE MARLIAVE O. Books, Courrier des lecteurs, 04/2012, p. 9.

Versatilité de gauche et obstination de droite...

Des dizaines d'études convergentes permettent de dessiner le portrait type du conservateur :  Plus structuré et constant dans ses jugements et son approche de la décision, scores élevés sur les échelles mesurant le besoin personnel d'ordre, de structure et de repli identitaire, écrit John T. Jost, professeur de psychologie à l'université de New York. 
L'homme ou la femme de gauche, en revanche, manifeste une plus grande tolérance pour l'ambiguïté et la complexité, une plus grande ouverture aux expériences nouvelles. Des études sur des vrais et faux jumeaux montrent que ces traits sont en partie hérités génétiquement, apparaissent dès la petite enfance et restent relativement stables pendant la vie.
OWEN L. (2008, Brain), Books, 04/2012, p. 67.

Primates dans l'isoloir...

[Bryan Caplan, professeur d'économie à l'université George Mason], pense que [les] idées fausses [des votants à propos des enjeux de société], engendrent des politiques néfastes pour la société dans son ensemble. Si le gouvernement adopte de mauvaises mesures, pensons-nous généralement, c'est parce que le système fonctionne mal, et il fonctionne mal parce que les électeurs sont mal informés, sensibles à la démagogie, ou que des groupes de pression viennent contrarier l'intérêt général. Caplan pense que tout ceci est inhérent à la démocratie : non pas des anomalies du processus, mais ce que l'on peut attendre d'un système conçu pour satisfaire les désirs du peuple. "La démocratie échoue, affirme-t-il, parce qu'elle fait ce que veulent les électeurs". 
La plupart des gens [aux Etats-Unis en tout cas...] ne pensent tout simplement pas en termes politiques. Par exemple, ils ne comprennent pas qu'on ne peut à la fois être favorable à une baisse des impôts et souhaiter une augmentation des dépenses publiques. [...] Si l'on demande aux gens s'ils approuvent une hausse du budget de la protection sociale, la plupart répondront non ; si on leur demande s'ils soutiennent une augmentation de l'aide aux démunis, la plupart répondront oui. 
[...] James Surowiecki [a montré] dans La Sagesse des foules [JC Lattès, 2008], [qu'] un grand nombre de personnes dotées de connaissances partielles et de degrés variés d'intelligence et d'expertise, obtiendront ensemble de meilleurs résultats, ou des résultats plus exacts, qu'un petit nombre d'experts très intelligents de même sensibilité. C'est ainsi que fonctionnent les marchés financiers, mais cela peut s'appliquer à bien d'autres domaines : évaluer les chances de gain dans un pari sportif ou deviner le nombre de bonbons dans un bocal. 
[...] Le non-économiste type ne comprend pas ou n'apprécie pas la façon dont les marchés fonctionnent (il est par conséquent favorable à la régulation et méfiant envers la recherche du profit), n'aime pas les étrangers (il a donc tendance à être protectionniste), assimile la prospérité à l'emploi plutôt qu'à la production (il surévalue donc la sauvegarde des emplois existants), et pense généralement que la situation économique ne fait qu'empirer (il est donc partisan de l'intervention de l'Etat). 
[...] Nous sommes tous soumis à des biais cognitifs. Le plus puissant étant sans doute celui que Daniel Kahneman appelle l'illusion de validité [...]. Illusion aussi courante qu'élémentaire : nous avons tendance à surévaluer notre propre jugement. Sans doute parce qu'il est plus rassurant de penser qu'on voit juste plutôt que le contraire. Ce travers doit être rapproché d'un autre, le biais de confirmation, la tendance à rechercher ou interpréter des informations qui renforcent ce que l'on pense déjà. 
[...] Ces deux phénomènes font intervenir ce que le psychologue Leon Festinger nomma la dissonance cognitive : nous fuyons les faits et les idées susceptibles de nous déranger. A cela une explication rationnelle, avance le physicien Freeman Dyson [...] ; dans la vie quotidienne, penser est ce qui coûte le plus cher en énergie ; notre intérêt est donc de le faire le moins possible.
[...] La plupart des gens, même si on leur expliquait quel est le choix économiquement rationnel, rechigneraient à le faire car ils attachent de la valeur à d'autres choses, en particulier, ils veulent se protéger contre les inconvénients du changementMENAND L. (2007, New Yorker), p. 25. 
Les recherches de politologues comme Diana Mutz indiquent que la prise en compte des différents aspects d'un problème est inversement proportionnelle à l'engagement. Plus on essaie d'envisager le point de vue de l'autre, moins on a tendance à être actif. Si l'on veut un électorat politiquement engagé, il faut sans doute renoncer en partie à la qualité du débat. OWEN L. (2008, Brain), p. 67.
Books, Pourquoi voter ? 04/2012.