Auto-dépréciation...

Les normes sociales peuvent empêcher de saisir les opportunités et de s'adapter, mais elles renforcent aussi les inégalités, comme celles qui régissent l'appartenance à des groupes sociaux et assignent des statuts hiérarchisés. Sur l'exemple des castes en Inde, Karla Hoff et Priyanka Pandey, de l'université de Pennsylvanie, démontrent que les croyances influencent les identités sociales bien après que les institutions légalisant la subordination ont été démantelées par l'Etat. A l'aide d'une expérience avec des élèves de l'Uttar Pradesh (résoudre un jeu de labyrinthe), elles montrent que si les élèves sont publiquement désignés comme appartenant à une caste inférieure, leurs performances sont de 25 % à 30 % moins bonnes que lorsque cette appartenance n'est pas mentionnée : cette précision leur fait anticiper qu'ils seront l'objet de discrimination et ils perdent confiance dans l'équité des règles du jeu. Mmes Hoff et Pandey en tirent l'importante conclusion, en termes de politique économique, que face à l'intériorisation de normes inégalitaires, la seule offre d'opportunités ne suffit pas.
Ces cercles vicieux sont renforcés par des effets dits de "voisinage" [...] qui renforcent à leur tour la conformité aux normes - conformisme rationnel car il y a plus de coûts à penser différemment, comme l'a noté Edward Glaeser, économiste à Harvard. C'est le cas lorsque les individus sont regroupés dans un même lieu, isolés et moins exposés à échanger avec des individus obéissant à des normes différentes, comme l'a montré Steven Durlauf, économiste à l'Université du Wisconsin, à propos des phénomènes de ghettoïsation et de la dimension spatiale du sous-développement. Les dynamiques de la persistance des inégalités seraient-elles identiques pour les pays pauvres et pour les pauvres dans les pays riches ?
Expérience citée par Joseph STIGLTZ, France Inter, 3D le journal, 09/09/2012.

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