Concurrence de médiocrité...
J'ai un jour posé la question à un représentant de la firme d'audit KPMG, en mission chez nous [CountryWide]. [...] Je l'interrogeai en ces termes : "N'est-il pas gênant qu'un certain élément de notre modèle [informatique] de gestion du risque soit inadéquat et que nous en soyons conscient ?". [...] Elle est revenu au bout de quelques jours avec la réponse suivante : "Je me suis renseignée : le même modèle est utilisé par l'ensemble de vos concurrents", et elle ajouta : "Cela ne pose pas de problème, puisqu'on peut considérer qu'il s'agit par conséquent de l'"industry standard" (de la norme sectorielle)". Page 105.
[...] Comment a-t-il été possible que des erreurs aussi flagrantes [dans l'évaluation des risques de crédits] puissent passer inaperçu ? Pourquoi n'a-t-on pas noté l'inadéquation entre les modèles [informatiques] et ce que l'on essayait de modéliser ? [...] En premier lieu, comme les marges de profit étaient substantielles durant les années 2000-2006...
Et pour cause... >>
... les questions méthodologiques furent refoulées à l'arrière-plan ; en second lieu, l'idée que la seule question sérieuse à se poser en finance est que la concurrence parfaite jouissait d'un consensus, avec pour implication que si tous les intéressés commettent la même erreur, nul n'est ni avantagé, ni désavantagé, et tout est dès lors pour le mieux dans le meilleur des mondes. Page 73.
Paul JORION (2012), Misère de la pensée économique, Fayard.
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